Chaud devant !!!

October 8th, 2013

Et chaud derrière aussi. Et puis à gauche. Et à droite. Et chaud partout en fait… Bienvenue dans le désert !

Je crois que nous rendre par les airs plutôt que par la route à Alice Springs est la meilleure idée que nous ayons eue de tout le voyage. Le nez collé au hublot pendant toute la durée du vol, nous observons ce à quoi nous avons échappé : 4000km d’étendue rougeâtre désertique, quadrillée par d’interminables routes parfaitement rectilignes… En admettant que nous ayons pu survivre à la chaleur, nous serions très certainement morts d’ennui ! Les quelques 1500km que nous nous apprêtons à parcourir au volant d’un autre van nous donneront un aperçu bien suffisant de l’outback australien.

Au sortir de l’avion, généreusement climatisé, les 42°C ambiants nous assaillent. Au moins, on ne peut pas dire qu’il n’y a pas d’air, ou que ce n’est pas ventilé. Mais au moindre souffle de vent, on a l’impression d’ouvrir la porte du four… Nous prenons possession de notre nouvelle location. Bien plus moderne que celle que nous avions sur la côte, elle est équipée d’un lecteur MP3. Alors pour faire honneur au pays, on se met AC/DC à plein volume. « Highway to Hell » est de rigueur, avec cette chaleur. Et ça cadre bien avec le paysage désertique. Nous nous mettons en route pour le centre rouge de l’Australie et le mythique rocher d’Uluru.

Le centre rouge… Sans doute à cause de la couleur cramoisie de la peau de ceux qui le traversent ? La chaleur est écrasante et l’air désespérément sec. Comme nous refusons obstinément d’allumer la clim, notre van se transforme rapidement en sauna. Nous cherchons quelques coins d’ombre lors de nos pauses, mais ici, le soleil réussit la prouesse d’être au zénith de 6h30 à 18h. L’ombre n’existe nulle part ! Pour se rafraichir, on essaye de boire chaud, fameuse technique touareg… Ca ne fonctionne pas. On essaye de boire frais, ça ne fonctionne pas non plus. On essaye de boire beaucoup, ça ne fonctionne pas. On essaye de boire de la bière, ça ne fonctionne pas. Mais au moins, on oublie que l’on a chaud.

La route est plutôt monotone, toute droite sur des centaines de kilomètres. Mais ce n’est pas inintéressant comme découverte. Le sol est tapissé d’une épaisse terre battue rousse, à faire pâlir de jalousie le court central de Roland-Garros. La végétation broussailleuse est brûlée par le soleil. Dès l’aube, nous sommes envahis par les mouches telles des bêtes de somme, et nous nous sentons soudain plein d’empathie pour ces chevaux ou ces vaches que l’on voit parfois pris d’assaut par les nuisibles. Non, vraiment, c’est sympa comme environnement ! Le seul moyen de ne pas devenir cinglés à cause des bourdonnements incessants dans nos oreilles, c’est de faire l’acquisition de moustiquaires de tête, qui nous confèrent de faux-airs d’hommes des sables (ou de martiens…).

Nous rencontrons de temps en temps un de ces fameux road-train, mais la route que nous empruntons est suffisamment large pour que nous puissions passer tous les deux sans problème. Nous ressentons néanmoins un grand mouvement d’air quand nous le croisons, lui et ses 3 ou 4 remorques lancés à 130 km/h. La nuit, ils se déguisent en traineau du père Noël, avec des guirlandes d’ampoules de tous les côtés, et deux projecteurs sans doute visibles depuis la lune en guise de phares.

Comme 99,99% des touristes, on se fait avoir par le Mount Conner, immense rocher en plein milieu de nulle part, que l’on peut distinguer à plusieurs dizaines de kilomètres et que tout le monde prend du coup pour Uluru. Nous nous arrêtons pour prendre notre lot de photos avant de reprendre la route et de réaliser notre erreur en croisant, un peu plus, tard le véritable mont. Croyez-le ou pas, mais nous sommes bien plus émus devant le vrai Uluru, sans savoir trop pourquoi…

Nous campons à Yulara, sorte de village de vacances créé pour les besoins touristiques juste à côté du parc d’Uluru – Kata Tjuta. Le pass nous donne un accès au parc durant 3 jours et nous en profitons pleinement pour aller admirer les rochers à toutes les heures du jour et de la nuit. Nous vivons à l’andalouse, debout très tôt le matin et très tard le soir, en s’octroyant une sieste bien méritée aux heures les plus chaudes. Il faut dire que si l'on veut voir le mont s’embraser aux premiers rayons du soleil, il nous faut mettre notre réveil à 5h (ouille…). Mais quel spectacle ! A chaque seconde, Uluru semble changer de couleur, dévoilant d’autres nuances, d’autres ombres. Nous ne sommes pas les seuls, loin de là, mais on trouve toujours une petite place qui nous donne l’impression de l’avoir rien que pour nous. Avant que la température ne grimpe de trop, nous entreprenons la balade tout autour du rocher, 10km à parcourir et autant de litres d’eau à prévoir, pour aller à la découverte de cavernes, de peintures rupestres, de grottes sacrées… Toute l’histoire du lieu !

L’histoire géologique et scientifique est assez classique : des couches sédimentaires, des centaines de milliers d’années, de l’érosion… Et tadaaaaa : voici Uluru ! Je lui préfère de loin l’histoire mythologique des aborigènes, plus poétique. Le mont aurait été façonné par les batailles de plusieurs figures ancestrales, durant le temps du rêve (la création de la Terre). On peut d’ailleurs encore voir la silhouette de Woma, la femme python, dans l’une des courbes du rocher, ainsi que les traces de son combat avec Liru, le serpent venimeux.

Je suis choquée par le nombre de touristes qui, malgré les demandes expresses des aborigènes, s’évertuent à grimper sur Uluru. Au pied de la montée, de grands panneaux expliquent le caractère hautement sacré qu’il revêt pour le peuple Anangu, et pourquoi il ne doit pas être foulé par des pieds humains. Et pourtant, tous les jours, des dizaines et des dizaines de touristes crachent sur cette requête. Nos voisins de camping sont d’ailleurs très étonnés : « Comment ? Vous venez de si loin et vous n’êtes même pas monté dessus ? »… Les aborigènes ont pu, grâce à une loi sur leurs droits fonciers, récupérer ces terres dans les années 1980. Il y avait cependant une toute petite condition de rien du tout : accorder un bail de 99 ans à Australia Parks, qui assure avec les Anangus la gestion du parc. Et bien évidemment, Australia Parks craint, en interdisant la montée, de voir chuter la fréquentation touristique. Le choix est donc laissé à la conscience des visiteurs. Je suis révoltée contre ceux qui montent et j’ai bien envie d’aller leur expliquer mon point de vue, mais Roro me rappelle que je n’ai pas de petite étoile de sheriff sur moi, alors je me contente d’aller signer le manifeste « I did not climb Uluru » (Je ne suis pas montée sur Uluru) au centre culturel.

Le lendemain, nous allons voir le soleil se lever depuis Kata Tjuta, les autres stars du parc. A 50km d’Uluru, nous avons l’impression de revivre le générique du Roi Lion, quand le soleil s’élève sur la savane. Nous nous baladons ensuite au milieu de ces montagnes sacrées, constituées d’un ensemble de dômes rouges. En français, Kata Tjuta signifie « beaucoup de têtes ». Les couleurs des roches contrastent magnifiquement avec le bleu éclatant du ciel. C’est très chouette car très différent de la promenade autour d’Uluru, et tout à fait complémentaire.

Les couchers de soleil sont également des moments magiques. Nous apprécions chaque bouleversement de couleurs, au fur et à mesure que les rayons déclinent, avant de plonger le mastodonte de pierre dans l’obscurité.

Au bout de 3 jours, nous repartons très heureux d’avoir programmé cette étape dans notre voyage. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas pris une telle claque, en termes de paysages.

Avant de remonter vers le Nord du pays, nous faisons étape à Kings Canyon, pour une autre belle journée de rando sous le soleil. Il s’agit de grimper en haut du canyon par un chemin nommé « la montée des infarctus ». Un peu effrayant, voire dissuasif… mais le sobriquet n’est vraiment pas justifié. Bien que, en toute modestie, nous soyons devenus de véritables machines de guerre en randonnée, nous croisons des familles qui grimpent tout aussi facilement. Au sommet, nous surplombons l’immense étendue du désert tout autour de nous. On se sent très loin de la civilisation. La balade serpente parmi des dômes de grès, érodés par le temps, qui nous rappellent les « pancakes rocks » découverts en Nouvelle-Zélande. Même si la roche ressemble beaucoup à Uluru, la promenade est encore une fois très différente. On ne se lasse pas des paysages. On se lasse juste un peu de cette chaleur étouffante, qui ne nous accorde aucune trêve !

De retour à Alice Springs, nous prenons notre temps pour parcourir les 1500km qui nous séparent de Darwin. Nous prévoyons nos haltes en fonction de points d’eau ou de rivières où l’on peut faire trempette. Nous nous arrêtons rapidement voir les Devils Marbles, une formation rocheuse aussi surprenante qu’Uluru : d’énormes rocs sphériques qui jouent au Djenga, en équilibre instable les uns sur les autres. Et pourtant, ils tiennent bon depuis des milliers d’années… Les aborigènes les considèrent comme les œufs du serpent arc-en-ciel. Pas étonnant que leur folklore soit si riche en légendes, avec de tels paysages pour les alimenter.

Nous franchissons pour la 3ème fois en six mois le tropique du Capricorne dans sens Sud-Nord. Ce sera la dernière fois cette année. Nous retrouvons peu à peu un climat plus humide, la végétation s’intensifie, l’air cesse de nous piquer les yeux. En revanche, les nuits fraiches, qui constituaient nos seuls moments de répit, laissent place à des nuits tièdes et moites, où le thermomètre ne nous fait l’aumône que de quelques degrés.

Tout le long de la Stuart Highway, qui relie Alice Springs à Darwin, les champs sont peuplés d’étranges rochers, évoquant de loin des stèles funéraires. Il s’agit en fait de termitières magnétiques, aux allures impressionnantes. Si certaines ne sont pas plus grandes que de vulgaires petites taupinières, d’autres colonies entreprennent carrément de reproduire la Sagrada Familia. Nous en croisons affublées d’un chapeau ou d’un t-shirt, en vrais petits épouvantails.

 Arrivés à Darwin, nous redevenons officiellement SVF, sans véhicule fixe, et nous retrouvons notre condition d’escargot, notre backpack sur le dos. Nous rejoignons aujourd’hui un couple d’amis tout droit arrivés d’Alsace pour un an en Australie, avec qui nous allons passer nos 10 derniers jours dans le pays. Après de longs mois sans voir de proches, nous trépignons d’impatience de les accueillir.

A bientôt pour la suite de nos aventures !

Les photos de cet article se trouvent dans l’album "Australie", à la rubrique "Alice Springs".

 


Photos (137)

Une réponse

  1. Coucou Jenny ! On a pris plaisir à penser à toi aujourd'hui au bureau !!!
    À défaut de gâteau d'anniversaire, je garde au chaud la recette du gâteau de ton retour...
    D'ici là, fêtez bien !!!
    Des bougies, des bisous et le plein de pensées.

Laisser un commentaire

Entrez le code