Angkor plus loin, Angkor plus fort !

December 9th, 2013

Souô Sadaï, bienvenue au Cambodge !

Notre bus nous dépose à Phnom Penh, devant un hôtel partenaire, assez excentré et à des prix trop élevés pour notre budget. Pas de problème, des dizaines de chauffeurs de tuk-tuk, ces petites carrioles tractées par une moto, nous assaillent pour nous proposer de nous véhiculer. Nous en choisissons un au hasard, négocions le prix et lui indiquons un quartier que nous avons repéré dans notre guide. Nous sommes arrivés en territoire cambodgien depuis 10 minutes et nous rencontrons déjà notre première arnaque tuk-tukienne : le chauffeur ne nous emmène absolument pas là où on lui a demandé, mais dans un autre quartier, et nous dépose devant un hôtel du même ordre de prix que le premier, qui le commissionne à chaque client rabattu. Nous sommes mécontents et ça se voit. Notre tuk-tuk-man s'excuse, fait mine de n'avoir pas compris notre première demande, et accepte généreusement de nous conduire au bon endroit. Enfin, moyennant le prix d’une autre course... Ça commence bien ! Finalement, nous terminerons notre quête d’hébergement à pied, et pour les prochaines fois, nous filouterons en prétendant que nous avons une réservation dans tel ou tel hôtel, seul moyen d’être déposés au bon endroit.

Nous ne restons que deux jours dans la capitale cambodgienne, son intérêt touristique étant assez limité. Les souvenirs traumatisants du musée de la guerre de Saigon étant encore bien présents dans notre tête, on s’épargne la visite du musée du crime génocidaire des Khmers Rouges. Les quelques lectures sur le régime sanguinaire instauré par Pol et ses potes nous suffisent, sans que l’on ait besoin d’illustrations.

On visiterait bien le Palais Royal, mais en arrivant devant, nous découvrons que l’entrée nécessite le port d’un pantalon long, de manches longues et d’un col roulé pour les femmes. Pour les touristes qui comme nous n’ont pas prévu le coup et qui, par 35°C, adoptent une tenue estivale, les burqas sont vendues à l’entrée pour la modique somme de 5$. Nous nous contenterons d’admirer le palais de l’extérieur.

Nous décollons ensuite Siem Reap, à l’ouest du pays, point de départ de la visite des temples d’Angkor. C’est parti pour 8 heures dans un bus qui avance cahin-caha sur les routes défoncées de la campagne cambodgienne. Pour ceux qui ont peur de s’ennuyer durant le trajet, le chauffeur enchaine les DVDs de films de Kung Fu et de clips mélodramatiques. Vive les boules Quies ! Toutes les 2 heures, nous nous arrêtons afin de refroidir les freins, en jetant de grands seaux d’eau sur les roues fumantes…

Pour notre premier jour à Siem Reap, nous louons des bicyclettes pour découvrir les environs de la ville. Les paysages découverts depuis le bus nous ont mis l’eau à la bouche, et rien de mieux que d’avoir son propre moyen de locomotion pour s’arrêter où l’on veut, quand on veut. C’est un joyeux bazar : nous croisons de nombreux enfants agglutinés à 4 ou 5 sur un seul vélo, roulant à contresens. Les camions nous dépassent en nous laissant une marge sympathique de 20 centimètres… Non vraiment, je ne vois pas pourquoi on nous bassine en France avec ces histoires de sécurité routière !

Nous les avons ratées au Vietnam, mais ici, nous arrivons au moment propice pour observer les rizières magnifiquement vertes. La route est bordée de maisons d’agriculteurs, perchées sur leurs pilotis. Comme chez les trois petits cochons, elles peuvent être en pierre, en bois ou en paille, selon le porte-monnaie de l’habitant. Et comme sur nos nobles colombages alsaciens, certaines maisons en bois affichent de jolies poutres sculptées, pour bien faire comprendre que si l’on n’a pas les moyens de se construire une habitation en dur, on est quand même moins pauvre que le voisin, qui ne sculpte même pas sa balustrade. Tous les gens que nous croisons nous saluent et nous sourient, c’est hyper agréable. De manière générale et au fil de nos rencontres, nous trouvons les Cambodgiens vraiment adorables. Gentils, accueillants, rieurs, serviables… De vrais bisounours en puissance, au sourire très contagieux.

En fin de journée, nous mettons le cap sur Angkor. Enfin plus précisément sur les caisses d’Angkor, qui ouvrent tous les jours en fin d’après-midi. Cela permet d’acheter son pass pour le lendemain et d’éviter de devoir faire la queue à 5h du mat’. Autre avantage, on peut mettre à profit les quelques minutes de jour restantes pour se rendre sur le site et bénéficier d’un coucher de soleil « gratuit ». On opte pour un pass de 3 jours, histoire d’avoir le temps et de ne pas tout faire au pas de course. Nous pédalons encore quelques kilomètres avant d’arriver aux portes de la cité. En voyant se dessiner au loin les tours d’Angkor Wat, nous ressentons ce délicieux frisson d’émotion désormais familier, la joie de se trouver devant un de ces lieux qui ont tant attisé notre imagination, la chance de réaliser son rêve… Le voyage serait-il une drogue dure ?

Le point négatif, corollaire  du succès des temples : la fréquentation touristique. A certains moments, c’en est carrément oppressant et la visite n’est plus plaisante. Seule solution, comme pour tous les grands sites que nous avons visités : arriver avant les autres. Les portes ouvrant à 5h du matin, on sait ce qu’il nous reste à faire.

La perspective de se lever à 4h du matin pour se farcir 15 kilomètres à vélo ne nous enchante guère, mais j’avoue que le réveil s’en trouve plus tonique : 10 minutes après le saut du lit, nous sommes en pleine forme, alors que nous avons d’habitude besoin de bien plus de temps pour émerger. Sur la route de Siem Reap à Angkor, on se fait doubler par de nombreux tuk-tuk, qui véhiculent les touristes moins courageux que nous. Soudain, à mi-chemin, Roro s'aperçoit que nous avons oublié l’appareil-photo à l’hôtel. On ne peut pas se lever si tôt et être 100% efficace ! Heureusement, nous faisons la route avec Julien, un tour-du-mondiste rencontré à Phnom Penh. Grâce aux 9 kilos de matériel photo de pro qu’il se trimballe, nous lui piquerons quelques souvenirs de la journée. Saurez-vous faire la différence entre ses clichés et les nôtres ? Nous accélérons la cadence, pour ne pas se retrouver au dernier rang. Il faut dire que vers 5h du mat’ à Angkor Wat, on a un peu l’impression d’être devant les Galeries Lafayette le premier jour des soldes… Le lever du soleil est un moment grandiose, mais il nous faut bien de la concentration et de la zen-attitude pour faire fi des 50 000 touristes autour de nous. Les jours suivants, on privilégiera des sites moins prisés.

Les temples d’Angkor sont suffisamment variés pour que nous ne nous lassions pas, même après 3 jours. Cette ancienne mégapole, dont le nom signifie tout simplement « Capitale » en khmer, comptait durant ses heures de gloire près de 800 000 habitants. C’est dire si l’endroit est vaste. On y rencontre aussi bien de gigantesques pyramides que de somptueux temples tout en enfilade. Hindouistes ou bouddhiques, les styles architecturaux diffèrent selon le culte pratiqué à l’époque où les temples ont été érigés. Sur les murs, des gravures d’une minutie remarquable racontent les épopées du Ramayana et du Mahabharata, les écrits fondamentaux de l’hindouisme.

Devant les imposants travaux de restauration, certains monuments reprennent vie et il ne manque plus que quelques éléphants, le Roi et ses concubines pour s’y croire complètement. D’autres, plus sauvages, sont laissés à la merci de la nature, qui exerce sa puissance en toute part. Ces derniers ont ma préférence.

Nous visitons sur 3 jours une vingtaine de sites différents. Deux d’entre eux se disputent la première place dans notre classement. Tout d’abord Ta Phrom, le sublime temple vulgarisé par le nanard « Tomb Raider », et ses roches emprisonnées au milieu de racines et de lianes, qui dégoulinent des arbres pour s’enchevêtrer dans les murs. Nous lisons qu’Angelina Jolie revient ici régulièrement depuis le tournage, avec son illustre amoureux. Nous cherchons parmi tous les touristes, dévisageant ceux qui portent des grandes lunettes et un chapeau, mais pas moyen de reconnaître une Lara Croft ou un Brad.

Challenger sur notre podium : le temple du Bayon, au cœur de la forteresse royale d’Angkor Thom. Ce chef d’œuvre architectural se compose d’une quarantaine de tours, au sommet desquelles sont sculptés quatre visages de Buddha, orientés aux quatre points cardinaux. On perd tout repère, en déambulant dans cet étrange dédale de pierres. Où que l’on regarde, on croise le regard plein de mystère et de sagesse d’un Buddha souriant. La visite est encore plus magique très tôt le matin, quand les premiers rayons du soleil viennent caresser les tours et avant que les cars ne déversent les flots de visiteurs.

72 heures sur place et autant de kilomètres parcourus à la force de nos mollets... Nous sommes comblés tant par l’effort accompli que par cette découverte inoubliable. Le retour à Phnom Penh se fait en bus de nuit. Contrairement à notre expérience de bus couchette au Vietnam, nous n’avons pas droit à une petite couchette privative, séparés des autres passagers par une allée. Ici, les couchettes ressemblent à une espèce de transat deux places et il faut partager ce petit espace avec son voisin de siège. Je suis bien contente de voyager affalée sur mon barbu, plutôt qu’à côté d’un inconnu cambodgien, si bisounours soit-il !

Après ces trois levers bien trop matinaux à notre goût, assortis d’une nuit sur la route peu reposante, nous enchaînons grasse mat’, sieste et glandouille à Phnom Penh. Nous en profitons pour dévaliser une boulangerie française, qui prépare de vraies viennoiseries comme à la maison. On bave d’envie devant leurs énormes gâteaux de Noël, mais l’heure n’est pas encore à la bûche. On se rabat avec appétit sur les petits pains au chocolat et leur variante asiatique, au haricot rouge, souvent utilisé ici en pâtisserie. Miam ! Tout cela pour dire que l’on fait le plein d’énergie pour la suite. Nous allons nous mettre en route vers le nord du pays, où nous vous promettons une prochaine aventure très…  aventureuse.

Restez connectés et rendez-vous très bientôt, dans la jungle du Ratanakiri !

Les photos de cet article se trouvent dans l’album "Cambodge", aux rubriques "Phnom Penh" et "Siem Reap".


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