La cordillère des villes et la cordillère des champs

May 4th, 2013

Le Chili est un pays facile à visiter. Pas d’itinéraire à construire, on va de haut en bas ou de bas en haut. Partout où nous arrivons, on ne nous demande pas de quelle ville on vient mais si on vient du Sud ou du Nord.  Nous arrivons donc depuis le Sud à Pucon, mignonne petite ville assez prisée des touristes. On comprend facilement pourquoi, avec ses environs vallonnés et verdoyants, ses lacs d’altitude et les 4 jeunes volcans qui l’entourent. Nous partons à l’assaut de l’un d’entre eux, le volcan Villarica. Impossible de le faire en autonomie, il faut passer par une agence. On n’aime pas trop mais en apprenant que l’on recherche toujours 4 randonneurs, pourtant chevronnés, disparus quelques semaines plus tôt, on ne discute pas. On signe avec Aguaventura, une agence ouverte par deux français installés ici depuis un paquet d’années. Ils nous préviennent de suite, si la météo est mauvaise, la grimpette ne se fait pas. Nous sommes craintifs car d’épais nuages gris stagnent au-dessus de nos têtes… Mais la chance est avec nous, nous traversons la couche de nuages au fur et à mesure que le bus grimpe pour nous emmener au pied du volcan. Au final, les cumulus bien décidés à nous gâcher la journée ne rendront celle-ci que plus magnifique : on a l’impression d’être sur le toit du monde face à cet océan immaculé. La montée n’est pas aisée, nous avons plus de 1000m à gravir, dont une partie sur le glacier formé au sommet du volcan. Nous enfilons tout le matos fourni par notre agence : crampons, piolet, casque… On a l’air de parfaits alpinistes (enfin, de parfait andinistes !). La grimpette est encore plus difficile sur glace, mais on apprécie tellement cette expérience inédite qu’on ne pense même pas aux cuisses qui chauffent. Au sommet, nous rencontrons le cratère, gigantesque. Il parait que par moments, on peut y apercevoir de la lave en fusion ! Nous ne verrons que de lourdes fumées vertes, qui nous piquent le nez, les yeux et la gorge. On ne reste pas trop longtemps et on va s’abriter pour pique-niquer devant une cantine somptueuse : panorama à 360° sur les environs de Pucon, les lacs, les autres volcans et au loin l’Argentine.

La descente semble être plus facile. On enfile un sur-pantalon, une sur-veste et une espèce de sur-culotte et il s’agit de descendre sur les fesses, dans une pseudo piste de luge creusée sur le glacier. Mister Roro s’élance, prend de la vitesse et s’amuse. Et moi, qui ai une sainte horreur des sports de glisse, je me la fais version Josiane Balasko dans les bronzés font du ski : « Ça va trop vite ! », « J’y vais mais j’ai peur ! ». Volcan : 1 – Jenny 0. Quelques grands moments de solitude (et de trouille) plus tard, on se retrouve tous en bas. Pour terminer la journée, l’agence nous invite à partager un verre une fois de retour au village.

Le lendemain, à peine remis de nos courbatures, on repart pour une autre jolie rando sélectionnée dans notre guide. Elle nous permettra d’apprécier un beau panorama sur le volcan que nous avons ascensionné. Mais au niveau des sensations et de la marche, après ce que nous avons vécu la veille, nous sommes un peu blasés !

Pour notre dernier jour à Pucon, on s’offre une parenthèse cocooning dans l’un des nombreux spots thermaux du coin. Des bassins d’eau chaude (42°C pour le plus chaud) creusés à même la roche font notre bonheur. Il pleut et le temps est maussade, tant mieux ! On apprécie d’autant plus d’être dans notre baignoire.

Après cette pause bien-être bien méritée, nous prenons un bus de nuit pour retrouver la civilisation et rejoindre la capitale. Nous arrivons à la gare routière au petit matin. Notre premier contact avec Santiago est agréablement surprenant. Nous nous attendions à une ville beaucoup plus sale, plus moche et plus craignos. Certes, nous ne restons que dans les quartiers touristiques et on ne s’enfonce pas dans les bas-fonds, mais ce que nous découvrons est très propret et surtout, très occidentalisé. Au fur et à mesure des années, les tremblements de terre ont eu raison de tous les bâtiments anciens et ont laissé place à une architecture très lisse, sans grande âme. La cathédrale, par exemple, a été reconstruite 5 fois en près de 3 siècles. Nous aurons la chance (ou pas) de ressentir notre secousse de la Cordillère : trois mini-soubresauts qui nous réveilleront en pleine nuit.

On prend de la hauteur en grimpant en funiculaire sur le cerro Cristobal, une colline qui surplombe la ville. On découvre alors ce qu’est le fameux « smog », ce brouillard de pollution qui écrase la ville. Il fait beau, le soleil brille et le ciel semble dégagé, mais on ne voit pas à 2 km. Nos photos sont toutes voilées, et on ne distingue pas les montagnes qui entourent la capitale. Santiago est construite dans une cuvette dominée par la Cordillère des Andes. Le vent y souffle très peu et le brouillard ne se dissipe que très rarement, nous laissant une impression étrange et pesante.

Nous partons visiter le fameux musée précolombien, brossé dans notre guide comme l’un des meilleurs du genre en Amérique latine. Chic ! Sauf qu’il est fermé pour rénovation depuis plus d’un an. Pas très à la page, le guide. Une petite partie de la collection est hébergée dans le musée des arts visuels, on en fait très rapidement le tour.

Une bonne surprise muséale sera par contre la maison de Pablo Neruda, « La Chascona ». On en apprend sur la vie du poète et sur sa passion pour la mer. Il voulait pour sa maison un plancher qui craque comme celui d’un bateau et des fenêtres semblables à des hublots. La maison regorge de collections de collections, des objets chinés lors de ses nombreux voyages. De la vaisselle aux lampes, en passant par les statues ou les verres à pieds de couleurs (il disait que l’eau y avait meilleur goût), on découvre un univers plein de poésie, romantique et naïf. Le guide passionné qui mène la visite y est pour beaucoup dans cet agréable moment.

Nous visitons son autre demeure à Valparaiso, construite comme un phare surplombant la baie et l’océan. La visite se fait cette fois-ci avec des audio-guides. C’est moins sympa, on n’a pas toutes les petites anecdotes, mais la maison est toute aussi farfelue que la première, avec une déco improbable faite de bric et de broc.

Hardi les gars, vire au guindeau, nous voici à Valparaiso ! Le mythique port du Chili, centre névralgique des marins du monde entier, jusqu’à l’ouverture du canal de Panama au début du 20ème siècle. Nous passons 3 jours dans cette belle ville, où nous retrouvons notre pote marseillais rencontré en Patagonie. On trouve un hébergement très sympa dans une chambre d’hôte tenue par un Toulousain installé ici depuis 11 ans.

J’ai pour Valparaiso un vrai coup de cœur. Les rues sont ultra-colorées et les maisons peintes de teintes vives, quand elles ne sont pas ornées de fresques ou de graffitis. Les habitations dévalent les cerros (les collines qui entourent la ville), qui partent se jeter dans la baie. Pour descendre, c’est facile. Et pour remonter, quand les muscles n’en peuvent plus, on emprunte les « ascensores », de vieux funiculaires datant de la fin du 19ème siècle. On croise les doigts pour qu’ils ne tombent pas en rade, mais non, ces vieilles machines fonctionnent toujours.

La ville compte un grand nombre d’étudiants, ce qui explique l’effervescence générale. Les soirées sont animées et les bars nombreux. On atterrit au « Gato en la Ventana », le chat sur la fenêtre, où un groupe de jeunes néo-gothiques nous joue un mélange d’I Muvrini et de Black Sabbath, entrecoupé de lectures de poèmes et d’airs de banjo… Vous avez dit bizarre ? Pour nous mettre dans l’ambiance, on teste le célèbre cocktail local : le Terremoto, ou tremblement de terre. La recette est aussi effrayante que le nom : un pichet de vin blanc, du jus d’orange, de la crème glacée à l’ananas, le tout arrosé de Fernet. On abandonne lâchement à la moitié du pichet, trop mauvais !

Le lendemain, soit aujourd’hui, nous reprenons notre route. Nous allons monter dans les Andes et partir pour le désert d’Atacama. Encore une expérience nouvelle à la clé, il s’agit d’un des déserts les plus hauts et les plus arides du monde. Ça promet !!!

A bientôt, et mille mercis pour vos chouettes commentaires.

Les photos de cet article se trouvent dans l'album "Chili", aux rubriques "Pucon", "Santiago" et "Valparaiso".

 


Photos (170)

3 réponses

  1. Coucou,

    C'est un réel bonheur de te lire Jenny,c'est comme si on partait avec vous 2.Bon vent pour la suite et gros bisous .
  2. Merci pour ces récits ! C'est super de vous voir ! J'ai hâte de lire la suite !
    Bizzz,P.
  3. hardi les gars, vire au guindeau, nos tourtereaux sont à Valparaiso.
    Il y a des villes qui font partie de notre patrimoine inconscient et qui font rêver et pour moi Valparaiso tout en couleur, en fait partie.
    Merveilleux récit de vos aventures
    Merci de ces partages et belle route à venir.
    biZOU

Laisser un commentaire

Entrez le code