Koh Lanta 2013 : Edition spéciale JennyetRoroOnTour

December 14th, 2013

Bonjour à tous !

Notre réveil sonne à 6h. Nous filons à la gare routière de Phnom Penh, attraper notre bus pour la région du Ratanakiri dans le Nord-Est du pays. Quand nous avons le choix, nous privilégions habituellement les bus de nuit pour les longs trajets. Si le sommeil n’est pas des plus réparateurs, la formule a l’avantage de ne pas nous faire perdre une journée dans les transports. Et question économie, nous n’avons qu’à payer un billet de bus alors qu’en voyageant de jour, il faut y ajouter le prix de l’hôtel ! Mais pour Banlung, chef-lieu du Ratanakiri, il n’y a qu’un bus par jour, à 7h du matin. Les paysages de la campagne cambodgienne nous tiennent compagnie durant les quelques 10 heures de trajet. Le nez collé à la fenêtre, le trajet passe plus vite que de nuit, où au final nous ne dormons jamais bien et où nous ne pouvons pas profiter du décor.

Notre bus s’arrête pour le déjeuner à Skun, où aura lieu notre épreuve de sélection pour cette édition spéciale de Koh Lanta JennyetRoroOnTour. Devinette gourmande (ou pas) du jour : quelle est la spécialité gastronomique de Skun ? Indices : on lui compte 8 pattes, c’est poilu, plutôt repoussant, on la mange frite et ce n’est pas très bon. Réponse dans notre album photos. Les gagnants en remportent une bouchée. En tout cas, notre cigogne-jury est formelle : nous décrochons notre sésame pour participer à l’aventure.

Arrivés à Banlung, petite ville aux airs de bout du monde, nous mettons sur pied notre expédition dans la jungle du Parc National du Virachey. Impossible d’y aller par nous-mêmes, il nous faut un guide. Ayant lu de bons avis sur internet sur l’agence Parrot Tour, c’est avec eux que nous décidons de partir, pour une excursion de 4 jours et 3 nuits.

Nous quittons Banlung le lendemain matin en moto, conduits par Sokha, un jeune cambodgien de 19 ans qui sera notre guide. Son père, qui travaillait dans une plantation d’hévéas durant l’époque coloniale, lui a appris le français, que Sokha maitrise quasiment à la perfection. Malgré nos supplications, il s’évertue à appliquer les enseignements de son paternel, et à nous vouvoyer en nous donnant du « Monsieur » et du « Mademoiselle ».

Après une heure de route sur une piste en latérite qui transforme notre trajet en parcours de moto-cross, nous sommes couverts de poussière rouge. Nous n’avons même pas commencé notre aventure que nous sommes déjà bons à passer en machine ! Nous arrivons devant un affluent du Mékong, et devons continuer sur une minuscule pirogue à peine assez grande pour nous transporter tous les 3. Nous nous enfonçons ainsi dans la forêt pour atteindre la commune de Kak Lok, où vivent les Kavaïds, une minorité ethnique du Cambodge. S’ils ont appris avec les années les rudiments du Khmer, leur dialecte, leurs rites et leurs modes de vie sont bien différents.

C’est dans ce village que nous rencontrons notre ranger, qui nous aiguillera durant cette expédition. Il se nomme Tok, ou Trog, ou Tlok. On n’a pas très bien compris et on n’a plus osé demander après la troisième fois ! De toutes manières, ce n’est pas son nom d’origine. Pris d’une forte fièvre incurable quelques années auparavant, il a changé de nom pour tromper les mauvais esprits qui le tourmentaient. Malin ! Cela a visiblement fonctionné puisqu’il est toujours là pour nous en parler. Par contre, il n’aura plus jamais le droit de prononcer son ancien nom, des fois que les esprits passent dans le coin et comprennent la supercherie… Pour les besoins de notre récit, nous le surnommerons donc Rambo, bien qu’il fasse passer tous les Rambo, les Chuck Norris et autres Bear Grylls pour des clowns de service !

Après une heure de marche en alternant forêt, rizières et prairies, nous arrivons à notre première épreuve : la traversée d’une rivière à pied. Dit comme ça, ça a l’air facile. Mais en rajoutant les paramètres « sac à dos à porter sur la tête » et « fort courant dans la rivière », ça se complique. Heureusement, nous avons Rambo dans notre équipe. Il se charge de passer nos sacs un à un sur l’autre rive. Grand merci à lui, car nous avons bien du mal à nous tenir debout, avec la puissance du courant et l’eau qui nous arrive presque à la taille. Mais nous nous en sortons saufs. Le temps de se sécher et l’on peut continuer.

Rambo attire notre attention sur chaque trace de vie dans la forêt : les griffures que laissent les ours sur les troncs d’arbres en grimpant pour chercher de la nourriture, les nids formés dans les feuilles par les fourmis rouges ou les termites, les trous que font les mygales dans le sol pour se construire un abri… Brrrrr ! Devant ce dernier, voilé par une fine toile, il nous explique que la « porte est fermée », signe que l’affreuse bestiole est partie à la chasse. Je ne sais pas si l’idée de la savoir en liberté dans la nature, plutôt que dans ce trou juste sous mes pieds, me rassure ou m’angoisse encore plus !

La végétation est si dense que Rambo se voit obligé de nous frayer un chemin, à grands coups de machette. Il la manie avec une dextérité incroyable, bien capable se tailler un cure-dent dans le tronc d’un séquoia ! Il doit aussi être équipé d’un GPS directement branché sur son cerveau, pour pouvoir se repérer dans cette jungle épaisse. L’exercice est assez sportif, il faut se baisser pour éviter les lianes qui essayent de nous étrangler, ou bien lever les pieds très haut pour déjouer les croches-pattes que tentent de nous faire les racines… Il faut aussi s’arrêter régulièrement pour décrocher les petites sangsues qui passent au travers des mailles du filet de nos chaussettes, nous laissant des petits points rouges sur la peau en guise de souvenirs. Tout cela évidemment avec 10 kilos de matériel sur le dos. On n’est pas loin d’entonner « Tiens, voilà du boudin » pour se donner du courage !

Alors que nous nous asseyons pour une pause bien méritée, nous sommes rejoints par des hommes du village, venus récolter quelques racines en forêt. Ils nous invitent à fumer leurs cigarettes locales, du tabac blond roulé dans une feuille d’arbre encore verte. C’est assez fort et cela me fait tousser, ce qui déclenche les rires de mon assistance. Afin de me rincer la gorge, Rambo dégaine sa machette pour me couper une liane et m’explique comme boire l’eau qui en coule. Quand il part dans la jungle pendant des jours pour chasser ou chercher du bois, c’est ainsi qu’il s’hydrate.

Nous atteignons notre campement à la tombée de la nuit, juste assez tôt pour installer nos hamacs et nous confectionner un abri de fortune avec une bâche, au cas où il pleuvrait pendant la nuit. L’épreuve, pour notre deuxième nuit, sera de dormir sans la bâche. Rambo accroche simplement nos hamacs à deux bambous, et nous dormons ainsi, à la belle étoile, avec le murmure incessant de la forêt en fond sonore, accompagné des petites voix dans notre tête qui se demandent « C’était quoi ce bruit ? Et celui-ci ?? Pourquoi es-tu encore allée t’infliger ça ?!? ».

Avant de tomber dans les bras de Morphée, nous discutons avec Sokha, très curieux du monde dans lequel nous vivons et très vif d’esprit sur son monde à lui. Il s’indigne de voir son gouvernement si corrompu ou de voir les vietnamiens chaparder au Cambodge ses ressources. Il nous apprend que nombreux sont les biens de première consommation produits au Cambodge, achetés et transformés au Vietnam, pour être revendus 5 fois leur prix d’origine aux cambodgiens. Ses questions sur nos modes de vie, que d’aucuns pourraient prendre pour de la misogynie, traduisent en réalité une naïveté candide, reflet des différences fondamentales de nos sociétés (du genre : « Mais alors, si les femmes travaillent autant que les hommes, qui s’occupe des enfants chez vous ? »).

En ce qui concerne la survie du camp, nous y allons tous de notre petite tâche. J’épluche les légumes, Sokha cuisine, Roro fait la vaisselle… J’avoue que Rambo est un peu plus actif que les autres : il nous fabrique des gobelets en bambou avec sa super machette, il pêche du poisson qu’il fait cuire à l’étouffée dans un bambou obstrué par des feuilles, et quand il juge que l’on n’a pas assez mangé, il part à la pêche au crabe dans le ruisseau. Sa technique consiste à plonger les deux mains dans l’eau et attendre que les crabes viennent lui pincer les doigts. Il revient après 10 minutes et une pêche fructueuse : 4 crabes et une grenouille, attrapée à mains nues. Il balance ces petites bébêtes vivantes dans la poêle encore chaude, y ajoute un peu de piment, de citronnelle et de basilic, et voilà, le dessert est prêt ! Pour qui n’a jamais vu de grenouille cuisinée autrement que des cuisses toutes préparées de chez Picard, c’est plutôt surprenant, et pas très ragoutant ! Mais nous faisons honneur à notre hôte-chasseur, et finalement, nous nous régalons.

Le troisième jour, nous arrivons en bordure de la rivière que nous avons passée à pied l’avant-veille. Voici la fameuse épreuve de la pirogue : il s’agit de construire une embarcation en bambou pour continuer sur l’eau. Les trois hommes forts s’enfoncent dans la forêt à la recherche des troncs adéquats pour élaborer notre radeau. Moi, je suis chargée de rester sur la berge et de garder les affaires. Je donnerais volontiers un coup de main, mais Sokha me fait comprendre que c’est un travail d’homme. Je les vois donc passer un à un, trainant sur leur épaule de lourds bambous de près de 10 mètres… et je remercie ma condition de femme qui a du bon, par moments ! Je remporte d’ailleurs mon épreuve haut-la-main puisque personne ne vient voler nos sacs. Après avoir abattu une dizaine d’arbres, Rambo décide qu’il a son compte. Il entreprend alors de fabriquer de la ficelle avec des lianes de bambou, afin de fixer le tout. Au milieu, il dresse un petit marchepied, pour surélever nos bagages. Encore quelques coups de machette pour élaborer des rames en bambou et nous pouvons nous lancer. Nous sommes babas d’admiration, il est trop fort, ce ranger ! C’est parti pour 3 heures sur les eaux plus ou moins calmes de la rivière qui borde le Parc National du Virachey. Nous alternons entre mer d’huile où nous deux guides doivent souquer pour nous faire avancer, et le passage de rapides rafraîchissants, où notre coquille de noix avance toute seule.

En arrivant presque au sec à destination, nous remportons notre épreuve de confort : ce soir, pas de nuit en hamac, nous sommes hébergés en chambre d’hôtes, chez des habitants de la minorité Kavaïd. Enfin, disons plutôt en natte en bambou d’hôtes, à même le sol, et séparés de la famille par une demi-cloison en paille. Mais comparé à nos précédentes nuits, pliés en 2 dans notre hamac, le simple fait d’être allongé rehausse de beaucoup le standing ! Sul, 70 ans, sa femme Ben, 32 ans (cherchez l’erreur) et leurs deux filles de 5 et 8 ans sont adorables. La communication est un peu difficile, mais leur accueil n’en est pas moins chaleureux et nous échangeons de nombreux sourires. Nous partageons l’unique pièce de leur maison avec les poules et un bébé cochon. Le cochon adulte, lui, a été sacrifié récemment car Sul est en proie à une mauvaise toux et des douleurs dans la poitrine. On ne sait pas encore si la technique a porté ses fruits, mais il doit être confiant puisqu’il continue allègrement de fumer son tabac roulé dans les feuilles d’arbres.

Après le dîner, nous sommes invités à goûter leur alcool local fait maison : du riz cuit et des œufs dans une jarre que l’on place au soleil pendant 3 jours, pour faire fermenter le tout. Juste avant la dégustation, on complète avec de l’eau, qui va s’imprégner de l’alcool, et que l’on boit à l’aide d’une grande paille (en bambou !) à même la jarre. C’est toute une cérémonie, nous utilisons tous la même paille et nous buvons à tour de rôle. On a déjà goûté de meilleures mixtures, mais ce n’est pas si mauvais que ça. Et cela assure l’animation de notre soirée, éclairés à la bougie puisque nos hôtes n’ont pas l’électricité.

Après une nuit reposante, nous revenons à Banlung, heureux et fiers d’avoir repoussé nos limites. Nous sommes tous d’accord pour décerner la victoire de cette édition spéciale Koh Lanta JennyetRoroOnTour à Rambo, notre super-ranger de choc.

Quant à nous, après s'être délecté d’une douche chaude et d’une nuit dans un vrai lit, il est déjà temps de dire au revoir au Cambodge, ce pays coup de cœur, et à ses habitants si sympathiques. Nous passons la frontière laotienne pour aller nous reposer dans la région des 4000 îles du Mékong, un vrai coin de paradis. C’est tout petit, il n’y a pas grand-chose à y faire, et c’est bien tout l’intérêt.

A très bientôt pour de nouvelles aventures !

Les photos de cet article se trouvent dans l’album "Cambodge", à la rubrique "Banlung".


Photos (45)

5 réponses

  1. Coucou Jennifer,
    On a bien pensé à toi mardi... Et oui, c'était le workshop !
    Et l'an passé, tu nous annonçais ton tour du monde...
    Vous vivez de telles aventures, c'est génial ! Et tes récits nous font voyager aussi...
    Plein de bisous de Paris
    Christine & co

    PS J'ai un copain de mon chéri qui a un centre de plongée à Koh Lanta : Dominique et Kat -
    Le Palm Beach Divers à Ban Koh Lanta, Krabi
    Si vous passez par là, faites leur un bisou de la part de Cédric et Christine
  2. Hi les p'tits gars,

    Maintenant que votre sympathique et gentillet échauffement est terminé, je vous attends sur le tournage du prochain épisode de "Naked and Afraid"

    Signé : l'ours
  3. Et bien, quelle aventure cette étape ! jai trouvé ca tres amusant, et si, si je vous ai presqu'envié (fatiha, nadege, fermez les yeux !)
    Je vous trouve plus heureux encore qu'au début du périple. Les km vous réussissent ou les expériences enrichissantes.
    Je vous embrasse !
  4. Coucou Jenny,

    Là je rends les armes ! Si je me suis dit parfois, c'est quand même sympa ce "petit" voyage, j'ai maintenant la certitude de ne l'avoir jamais pensé ;)
    Aujourd'hui dans mon agenda MAGIQUE 2013, il est noté "penser à faire son shopping de Noël".
    Et même que je ne t'ai pas oublié ! donc j'insiste reviens nous vite, nous avons plein de cadeaux en retard (amassés ici et là, mais toujours en pensant : ça ferait plaisir à Jenny).

    Je t'embrasse ma belle
  5. Coucou !
    Alors je n'aurai qu'une seule question : pourquoi ? ;0)
    (Les photos sont très belles).
    Bises.

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