Deux semaines au paradis

July 27th, 2013

Bravo à tous ceux qui ont résolu la laborieuse énigme de notre destination : il s’agissait bien de l’île de Pâques. Les gagnants remportent une photo de moaï dédicacée !

Si je mentais un peu sur le point de vue administratif en disant que nous quittions pour de bon l’Amérique latine (l’île de Pâques est rattachée au Chili), géographiquement et culturellement parlant, on est très loin du continent. Ce tout petit bout de terre est bien isolé, au beau milieu du Pacifique : les côtes chiliennes se trouvent à 3760km et Tahiti à 4100km. Il faut pagayer 2000km pour atteindre la première île habitée, qui compte à peine une cinquantaine d’âmes.

Nous sommes très émus d’atterrir ici. Notre seul regret est de n’avoir pu être assis côté hublot dans l’avion, pour admirer l’arrivée sur cette terre perdue dans l’océan. Nous débarquons en milieu de journée, avec un soleil rayonnant au zénith, qui nous met de suite dans une ambiance de tropiques. Les palmiers, bougainvilliers et autres hibiscus, ainsi que la mer turquoise accentuent cette atmosphère de vacances.

L’île vit essentiellement grâce au tourisme, et les hébergements sont tous très chers. Ce sera donc camping pour nous, sans frustration aucune car l’endroit est très joli, ombragé par de grands arbres et avec des équipements au top.

L’unique village de l’île, Hanga Roa, est très petit et se parcoure facilement à pied. En revanche, pour aller d’un bout à l’autre de l’île, il vaut mieux être motorisé, même si les distances restent courtes : 23km de long sur 12km de large. Le premier jour, nous louons un scooter pour faire le tour complet et nous familiariser avec les environs. On se la joue dolce vita, Roro au volant, moi le nez au vent. Nous prenons la route de la côte, qui d’après notre plan compte de nombreux « ahus », des plateformes cérémonielles sur lesquelles se dressaient les Moaïs. Mais nous ne voyons rien que des tas de grandes pierres amassées sur le sol. Décevante, cette route ! C’était avant de comprendre que ces monolithes gigantesques sont en fait des Moaïs renversés, face contre terre. Nous apprenons par la suite que les Moaïs étaient construits par les différentes tribus de l’île pour représenter leurs ancêtres. Quand un conflit éclatait entre deux clans, les vainqueurs renversaient les statues du clan vaincu en signe de victoire et de soumission. Les raz de marée et autres tremblements de terre ont eu raison de beaucoup d’autres Moaïs encore debout.

Quelques ahus ont fait l’objet de remarquables travaux de rénovation, pour qu’on puisse les contempler aujourd’hui tels qu’ils étaient à l’époque de la civilisation Rapa Nui, aux alentours du 9ème siècle. C’est le cas de celui que nous croisons tout au bout de la route de la côte, l’ahu Tongariki. 15 impressionnantes statues aux tailles et morphologies très différentes se dressent majestueusement, dos à la mer. C’est absolument grandiose et comme on est en plein hiver, il n’y a que peu de touristes. On passe un long moment à les admirer, rêveurs, en imaginant de folles hypothèses sur la manière dont ils seraient arrivés jusqu’ici. Derrière eux, l’océan se déchaine avec fracas sur les rochers. Les Moaïs se détachent parfaitement, sur fond de ciel azur. Il paraît que c’est encore plus beau au lever du soleil. Nous mettrons notre réveil aux aurores le lendemain pour vérifier l’info, mais les nuages nous en empêcheront et on ne verra pas le soleil se lever ce jour-là.

Les jours suivants, pour se déplacer, on lève le pouce. Cela fonctionne particulièrement bien sur cette île, les habitants font même des détours pour nous déposer là où l’on souhaite. Cela permet aussi de discuter un peu avec les locaux, et de confirmer qu’ils n’ont rien de chilien, ni de sud-américain. La culture est bel et bien polynésienne, de même que les faciès. Comme beaucoup d’insulaires, certains souhaiteraient l’indépendance de leur île, d’autant plus que le niveau de vie est ici largement supérieur à celui du continent. Cependant, quelques Pascuans ayant plus la tête sur les épaules nous confient que leur situation économique ne leur permettrait jamais d’être une nation indépendante. Nous rencontrons aussi quelques français établis sur place, qui pour rien au monde ne retourneraient dans leur mère patrie, tant la vie est douce ici.

Nous visitons la carrière de pierre où les Moaïs étaient sculptés, à même la roche et d’une seule pièce. Nous en apprenons beaucoup sur la manière dont travaillaient les Rapa Nui et sur la tâche colossale que représentait la réalisation d’une statue. Situé sur l’un des nombreux volcans de l’île, l’endroit compte près de 400 exemplaires, terminés, en cours de réalisation ou abandonnés en cours de transport. Ce dernier cas constituait le triste sort réservé aux statues qui se brisaient sur la route, ou que l’on n’arrivait pas à transporter. Si les théories les plus loufoques ont été imaginées sur la façon dont les statues étaient déplacées jusqu’à leur ahu, on sait aujourd’hui que les légendes ne mentaient pas tout à fait. Les anciens racontaient en effet que chaque Moaï, une fois terminé, se mouvait de lui-même jusqu’à sa plate-forme, animé par le mana (l’énergie sacrée) de l’ancêtre qu’il incarnait. On ne sait pas s’il y avait du mana ou pas, mais les recherches ont montré que les Rapa Nui ne faisaient pas rouler leurs statues sur des rondins de bois, et qu’ils ne les tiraient pas non plus à même le sol. Ils les déplaçaient debout, en les poussant, comme un frigo géant. On se dit qu’on aurait bien aimé les avoir pour notre dernier déménagement, ces petits gars-là !

Pour monter sur le toit de l’île, le volcan Tere Vaka, qui culmine à 511m, nous optons pour la solution « Lucky Luke » et nous nous offrons une balade à cheval. Nous précisons à l’agence que nous n’avons pas d’expérience en la matière et demandons des chevaux dociles, pour débutants. Résultats, on se retrouve avec deux fringuants destriers, aussi vifs que des limaces shootées au Xanax ! On a l’impression de faire du manège, c’est rigolo. Même quand on leur donne l’ordre de trotter, ils s’arrêtent d’eux-mêmes au bout d’une dizaine de mètres. Depuis le sommet, nous pouvons certifier qu’il s’agit bien d’une île : il y a de l’eau partout autour, à perte de vue. Cela en donne le vertige ! Il paraitrait que l’on peut même distinguer la courbure de la terre depuis ce point précis. On penche la tête, on plisse les yeux, on essaie du mieux que l’on peut mais pas moyen d’apercevoir quelque courbure que ce soit…

Le reste de notre séjour est consacré à l’ascension, à pied cette fois, d’un autre volcan et de son magnifique cratère, constitué de plusieurs dizaines de petits lacs. Le ciel s’y reflète, créant une fantastique mosaïque de couleurs. Nous allons méditer devant tous les autres ahus et Moaïs de l’île, dont le fameux Moaï Ko Te Riku, le seul à avoir retrouvé ses yeux (mais nous préférons ceux qui n’en n’ont pas, et leurs visages plus énigmatiques). Nous trempons nos pieds dans les eaux limpides de la plage d’Anakena, une des plus belles que nous ayons jamais vue, avec son sable blanc et ses Moaïs qui jouent à cache-cache avec les cocotiers. Nous dégustons d’excellents plats de poisson cru, la spécialité de l’île… Nous considérons un peu ces deux semaines dans le Pacifique comme des mini-vacances dans notre année de grandes vacances alors on s’autorise à glandouiller pendant plus de 24h d’affilée. On fait le plein de repos, pour réattaquer ensuite avec un rythme de visite plus soutenu, dans des pays plus énergivores.

Les 6 jours sur l’île de Pâques touchent à leur fin. Même si nous avons largement eu le temps de tout voir, nous aurions aimé passer encore quelques jours ici, pour retourner sur l’un ou l’autre site, ou tout simplement apprécier le rythme de vie si zen et la gentillesse des locaux. Mais l’avion nous attend, et notre destination suivante nous fait vite oublier les quelques regrets que l’on pourrait amasser : on s’envole pour Tahiti !!!

En sortant de l’avion, à l’aéroport de Papeete, nous sommes immédiatement saisis par la chaleur ambiante. Pourtant, il est 1h du matin et il fait nuit noire. La propriétaire du gîte que nous avons loué vient nous accueillir à la sortie de l’avion avec de magnifiques colliers de fleurs qui embaument. On sent qu’on va être bien ici !

Nous avons réservé pour notre séjour un studio tout équipé, à Paea, à quelques kilomètres de Papeete. Cela nous fait un bien fou de nous poser, d’avoir un chez-nous. Qui plus est, le studio est vraiment chouette. Hyper cosy, très joliment décoré, super bien équipé… Après nos 4 mois de bourlingue en Amérique du Sud, nous avons l’impression de descendre au Hilton. Nos hôtes sont adorables, plein de petites attentions pour nous, c’est un bonheur. (Caro Studio à Paea, pour ceux qui envisagent un séjour au bout du monde, les pieds dans l’eau : http://carostudio.centerblog.net/)

La plage se trouve à moins d’une minute à pied de notre lit. Le premier jour est consacré à la découverte du lagon, à l’eau merveilleusement transparente, et à sa riche faune sous-marine. On découvre une multitude de poissons, aux tailles et couleurs variées. Chic, nous avons un appareil photo étanche jusqu’à 10m : à nous les beaux clichés subaquatiques ! Mais après 2 prises de vue, l’appareil rend l’âme. L’étanchéité n’était valable qu’hors de l’eau, sans doute. Dégoûtés, nous perdons du temps à râler auprès de l’e-vendeur pour faire valoir notre garantie et à faire les paperasses. Au final, nous nous ferons intégralement rembourser (ouf !), mais nous passerons nos vacances à Tahiti à nous débrouiller avec les appareils photos sommaires de nos téléphones portables…

Comme lors de beaucoup d’étapes de notre voyage, nous avons la chance d’arriver au bon endroit au bon moment ! Chaque année, à cette période, se déroule le Heiva, un grand concours touchant aux cultures traditionnelles polynésiennes. Les participants s’affrontent autour de compétitions sportives, de chants ou de danses traditionnelles. On ne pouvait tomber mieux : la fille de nos propriétaires danse dans une troupe qui participe au Heiva. Nous assistons donc à la préparation des costumes en amont, et à la représentation le jour J. Près d’une centaine de danseurs et danseuses s’agitent, au rythme endiablé des percussions. Plusieurs magnifiques tableaux se succèdent. Les couleurs des costumes éclatent, les feuilles de palmes frissonnent sous les déhanchés des danseurs. C’est hyper-animé et nous, on est ravi d’être là, à taper dans les mains pour encourager la troupe de notre hôte. On apprendra par la suite qu’ils ont été primés et ont terminé 2ème au concours. Bravo ! Il est interdit de prendre des photos de la représentation (cela tombe bien, nous n’avons plus d’appareil), mais nous avons pu en récupérer quelques unes des vainqueurs, en exclusivité pour jennyetroroontour !

Entre deux journées de plage, à bouquiner à l’ombre d’un cocotier, nous visitons tout de même un peu les environs. Nous passons deux jours sur Moorea, la petite île en face de Tahiti. Dans notre camping, nous rencontrons un belge qui nous fait part d’un super bon plan : tous les jours, dans le lagon de Moorea, sont organisés des tours pour emmener les touristes nager avec des raies et des requins (petits et inoffensifs, rien à voir avec la Réunion, pas de panique !), que les tours operators appâtent avec de la nourriture. Ces tours coûtent affreusement cher, mais comme la mer est à tout le monde, on peut squatter les environs et bénéficier du spectacle, si l'on sait où il se joue. On prend les renseignements du lieu exact et nous louons un kayak pour nous y rendre. On arrive les premiers. De notre kayak, nous apercevons les raies, tapies au fond de l’eau. A cet endroit, il y a à peine 1.20m de fond, on les distingue parfaitement. On hésite un peu à se jeter à l’eau car elles sont impressionnantes, un bon mètre d’envergure pour certaines. Nous sommes rapidement rejoints par d’autres kayaks qui connaissent le tuyau, et qui ne font pas tant de manière que nous pour aller nager avec ces gros poissons. Alors on se lance également, munis de nos masques et tubas. Pas craintives du tout, les raies évoluent tout autour de nous, c’est magique. Les bateaux touristiques arrivent, et en même temps qu’eux, de plus en plus de raies et de petits requins, bien habitués à l’heure du déjeuner. C’est une expérience extraordinaire, que de voir toute cette faune si proche de nous. Les raies viennent littéralement manger dans les mains qui les nourrissent, nous pouvons les caresser et sentir leur peau toute douce. Les requins gardent naturellement leurs distances avec nous et bifurquent dès qu’ils entrent dans notre périmètre. On passe près d’une heure à les admirer, oubliant presque que nous avons la tête sous l’eau tant la respiration par notre tuba est facile, l’attention ainsi focalisée sur ces animaux. On parle peu, en pagayant sur le trajet retour, tous les deux encore sous le charme de ce que l’on vient de vivre.

Retour sur l’île de Tahiti, re-glandouille, re-sieste, re-plage. Le soir, on se goinfre de poisson cru au lait de coco, accompagné d’une Hinano, la savoureuse bière locale.

Pour notre dernier jour en Polynésie, nous partons pour une excursion d’une journée, sur l’atoll de Tetiaroa. Pour la petite histoire, Marlon Brando, venu ici en 1960 à l’occasion du tournage des « Révoltés du Bounty »  tomba amoureux des lieux et l’acheta pour une bouchée de pain. L’île, restée publique pour une toute petite partie, peut se visiter. Après un long et houleux trajet sur une mer agitée, on découvre un véritable paradis sur terre. La Polynésie, tel qu’elle est dans l’imaginaire collectif : des eaux cristallines qui dessinent une extraordinaire palette de bleus, un sable si blanc que c’en est éblouissant, d’immenses cocotiers verts émeraude, des bancs de poissons argentés qui viennent nous chatouiller les pieds… Nous ne sommes pas très loin du jardin d’Eden. Près du récif, les poissons sont encore plus nombreux et plus colorés que tout ce qu’on a pu voir jusqu’à présent (et nous encore plus enragés de ne pas pouvoir les photographier). Après un déjeuner pique-nique sur la plage, il est temps de reprendre la la mer. Le trajet retour est aussi pénible qu'à l’aller. Je n’aurai jamais le pied marin, c’est une certitude ! Mais cela valait le coup d’être malade pour voir toutes ces beautés.

Notre séjour en Polynésie Française se termine. Il nous aura fait beaucoup de bien, nous sommes reposés, ressourcés et en pleine forme pour la suite. Nous réalisons que le fait d’avoir un chez-soi nous manque (imaginez, on a même pris plaisir à faire la vaisselle ou à passer le balai !!!) et que nous serons heureux d’en retrouver un au retour. Ça tombe bien, on continue le voyage avec un autre chez-nous, monté sur roulettes cette fois-ci : nous allons parcourir la Nouvelle-Zélande en van aménagé. Comment allons-nous gérer la conduite à gauche ? Allons-nous croiser des Hobbits ?? ou des All Black ??? Vous le saurez dans le prochain épisode des aventures de Jenny et Roro !

A bientôt.

Les photos de cet article se trouvent dans l’album "Chili", à la rubrique "HangaRoa" (pour les photos de l'île de Pâques) et dans l’album "Polynésie Française" (pour les quelques photos récupérables de Tahiti).

 


Photos (85)

7 réponses

  1. Les photos sont sublimes ! ll est bien loin le "jenny et roro on tour" gravé dans la neige de New York :-)
    J'ai hâte de découvrir la Nouvelle Zélande !!
    Bises à tous les deux...
  2. Merci de nous faire rever Bon anniversaire Rodolphe je bois une pinte a ta santé
  3. Gloups, bad luck pour l'appareil photo.
    Encore un de ces remarquables trucs vendus par la white star line ?
    Vraiment dommage car l'un de vous deux avait un remarquable coup d'oeil pour les couchers de soleil.

    Welcome down under

    Edward John Smith
  4. Coucou les baroudeurs,
    Le photos sont toujours aussi superbes et vous aussi.
    Je vous embrasse
  5. vivement octobre!!! j'ai hâte de vous voir =)
  6. Superbe reportage ! quel plaisir de te lire et d'apprendre toutes ces choses.....très chouettes photos aussi ! Merci de nous faire découvrir tous ces endroits ! si tu vois Mike en NZ, fais-lui une bise de ma part :-)) Bizz à vous deux, P.
  7. Coucou à tous les deux,
    Un grand MERCI pour la carte d'anniversaire qui est arrivée parfaitement à l'heure !!!
    Et comme c'est dans l'air du temps : Rodolphe devrait rugir à son tour alors Bon Anniversaire également :0)
    Très bonne continuation... Seb est vert de jalousie quant à votre actuelle destination.
    Des pensées et des bisous !

Laisser un commentaire

Entrez le code